Qui est Hildegarde de Bingen ?

« Que les hommes apprennent donc à goûter la beauté du firmament ! Dieu emplit de ses œuvres le monde tout entier. »

L'Histoire d'Hildegarde de Bingen

Son enfance et son évolution

Contrairement à l’histoire d’Hildegarde de Bingen que l’on raconte, au départ, elle ne s’appelle pas Hildegarde de Bingen. Elle naît, dixième enfant de Mathild et Hildebert, qui sont des nobles de la bonne société du comté de Spanheim dans le Palatinat. Elle était d’une noblesse de bon rang et ses parents étaient des gens importants. C’est une enfant facile, mais fragile de santé, c’est le problème. Elle est très réservée, souvent perdue dans ses pensées et ses rêves. Devenue adulte, elle dira avoir reçu dès son plus jeune âge les premières grâces du « Très Haut ». En l’occurrence, elle dira « Dans la troisième année de mon âge, j’ai vu une telle lumière que mon âme en a été ébranlée. Mais à cause de mon enfance, je n’ai rien pu dire. » Son entourage familial repère assez vite que cette enfant présente de bien curieuses facultés.

Ses capacités médiumniques

Assise alors qu’elle est à peine âgée de cinq ans avec la nourrice qui la garde, devant une vache qui est dans son pré, elle déclare à la nourrice : « Vois donc le joli petit veau qui est dans cette vache. Il est blanc avec des taches au front, aux pieds et au dos. » La nourrice se demande comment la petite a pu deviner que la vache était pleine. Quelques jours plus tard, lorsque le petit veau va naître, avec toutes ces particularités décrites par Hildegarde, que la nourrice découvre qu’elle a exactement les tâches et les particularités de pelage qu’a décrit la petite fille. 

Donc, elle a des capacités médiumniques et l’histoire d’Hildegarde de Bingen commence. Pour Hildegarde, ses visions ne sont pas toujours faciles à gérer, comme elle le dira plus tard, parce qu’elle se sent isolée. Elle a conscience que les autres ne voient pas du tout la même chose qu’elle et elle n’ose pas trop le dire. Hildegarde se tait et elle se dit qu’il est peut-être préférable de ne pas révéler ce qu’elle voit et qui souvent la dépasse parce qu’elle ne comprend pas forcément ce qu’elle voit

Son éducation

Lorsqu’elle atteint ses huit ans, ses parents pensent qu’il est temps qu’elle reçoive une bonne éducation. Ça commence évidemment par savoir lire et écrire. Et ces gens-là considèrent que les filles doivent être aussi instruites que les garçons, ce qui est une bonne chose. Elle va recevoir d’abord une éducation humaine et chrétienne qui lui sera dispensée par une veuve consacrée, donc une femme qui est restée veuve et qui s’est plutôt consacrée aux religieux.

Pour poursuivre son apprentissage, quand on estimera que la veuve a fait ce qu’il fallait, on va l’envoyer chez les Bénédictines, du monastère de Disibodenberg. Là-bas, il y a une abbesse, Jutta, qui est la fille très respectée du comte de Spanheim, une noblesse importante. Elle va prendre aussitôt sous son aile la petite Hildegarde et va surveiller de près son éducation et l’enseignement qui va lui dispenser. Rapidement, on remarque qu’elle étudie les psaumes avec ferveur et application. Elle va aussi apprendre là-bas le chant et apprendre à jouer un instrument à cordes pour accompagner ses chants. Hildegarde va se montrer très douée en musique

Hélas, la petite Hildegarde est fragile depuis sa naissance et comme elle met une ardeur excessive à faire tout ce qu’elle fait, elle va finir par s’épuiser. Et lorsqu’elle se retrouve au lit, la mère abbesse, Jutta von Sponheim, qui la considère comme sa fille, la prend dans ses bras affectueusement, elle prend bien soin d’elle. Une relation de confiance profonde et de telle confiance qu’Hildegarde, qui reçoit beaucoup d’amour, le lui rendra bien et se décidera à lui confier un beau matin son lourd secret. Elle lui révèle ses visions. La mère abbesse n’est pas plus choquée que cela. Tout au contraire. Si bien que la petite fille va continuer à grandir tranquillement chez les bénédictines.

Son adolescence et son ascension

Hildegarde est sous la protection compréhensive de cette mère abbesse et c’est dans la sérénité qu’elle va atteindre ses 12 ans. C’est un cap pour les filles à l’époque, parce qu’on les marie. On cherche le prétendant à seulement 12 ans.

Donc, elle est visée, évidemment, comme toutes les adolescentes, surtout celles de la bonne société, pour aller se marier. Elle le sait, elle le redoute, mais sa famille ne la presse pas. Quand ça lui prendra, ça lui prendra. Lorsqu’elle va attendre ses 14 ou 15 ans, Hildegarde va annoncer à Jutta et à sa famille que cette décision est irrévocable. Hildegarde va prendre le voile et va devenir religieuse. Personne n’y voit d’inconvénient et elle deviendra donc religieuse. Derrière les murs du monastère, au tout début de sa vie, la vie s’écoule paisiblement, elle est appréciée des autres religieuses. On aime sa joie, son humanité, sa gentillesse. C’est une bonne camarade, c’est pourquoi, lorsqu’en 1136, la mère abbesse, Jutta, va décéder, les sœurs vont naturellement l’élire « mère abbesse » en remplacement de celle qui vient de décéder. Hildegarde est donc la nouvelle abbesse de Saint Disibodenberg , qui est le nom du monastère. Elle est âgée alors de 38 ans.

La vision qui va tout changer

Elle avait toujours des visions, mais pas les grandes visions qu’elle va avoir maintenant. En 1141, tout va changer. Une grande lumière lui apparaît. C’est une lumière, dira-t-elle, qui était d’une extrême brillance et venue du ciel, et comme fondu sur elle. Cette vision, elle l’a vu avec ses yeux physiques. Tu verras que la plupart de ses visions, ce n’est pas le cas. Ce sont plutôt des visions intérieures. Hildegarde écrira plus tard que cet étrange phénomène qui a éclairé la nuit sombre d’un seul coup ne brûlait pas. C’est tombé vraiment sur elle et elle a ressenti sur le moment comme une douce chaleur semblable à celle de la caresse d’un soleil d’été sur la peau nue, dira-t-elle. De cette lumière résonne une voix, une voix qui semble venir du ciel. La voix lui dit « Je suis la lumière vivante qui illumine ce qui est obscure. » Et elle dira encore « Dis donc ces merveilles et écrit les telles qu’elles t’ont été enseignées ». La voix lui demande ainsi de relater les visions qu’elle va avoir à l’avenir et les messages qui les accompagnent.

Ses débuts difficiles

Elle sent instinctivement que derrière tout ça, la Voix céleste risque de la mener dans une tâche dont elle ne se sent pas les épaules. Dès cet épisode surnaturel, l’existence de la mère abbesse va être bouleversée. Les visions vont se multiplier au fil du temps. Et quelle vision ? Il faut souligner que ça n’a pas été facile parce que dans un premier temps, elle n’arrive pas à obéir à l’injonction du Ciel qui lui a été donné. Elle est comme paralysée. Sera-t-elle à la hauteur de la tâche ? Est-elle digne de cette mission que le Ciel semble vouloir confier ?  C’est alors qu’elle tombe brusquement malade et très, très malade. Intuitivement, elle sait que c’est ce que signifient ces maux qui la clouent au lit. Hildegarde va se décider enfin à prendre la plume et comme par enchantement, la maladie va s’éloigner. Ce qu’elle ignore encore, c’est que la tâche qui l’attend est proprement colossale.

Ses écrits et sa rencontre avec Volmar

En 1141, elle entreprend la rédaction d’un premier ouvrage qui est connu sous le nom de Scivias qui signifie « Connaît les voix ». Hildegarde mettra près de dix ans à l’achever, avec évidemment ses visions qui nourrissent son œuvre. En dépit de cette tache de scribe qui occupe une bonne partie de son temps, il faut quand même le dire, elle se montre d’une énergie absolument incroyable dans la direction de son monastère. Mais dans ce monastère, il y a les religieuses d’un côté et les religieux de l’autre. Elle va donc se faire aider par un des moines qui s’appelle Volmar.

Dans son livre, Hildegarde explique la création et le salut de l’humanité au regard de 26 visions qu’elle a eues. Les six premières visions concernent la bonté du Père pour sa création. Les sept suivantes évoquent le salut qui est à l’œuvre par le Fils, donc Jésus, où le rôle de l’incarnation est un élément central. Et quant aux autres visions, elle traite du salut donné par le Saint Esprit. L’ouvrage restitue avec précision le détail de chaque vision et l’interprétation stupéfiants qu’Hildegarde de Bingen en fait. Là-dedans, il y a de magnifiques illustrations qui appuient le récit des visions. Le moins qu’on puisse dire, c’est que c’est un livre qui sort de l’ordinaire pour l’époque.

Eugène III, on ne peut plus enthousiaste, s’empresse d’écrire à Hildegarde de Bingen et lui dit tout le bien qu’il pense de son œuvre. Une belle lettre dans laquelle, il lui donne par la même occasion son autorisation pour qu’elle puisse quitter le monastère, parce qu’il a eu vent que les sœurs étaient un peu à l’étroit.

La suite de ses écrits

Elle travaille déjà l’écriture d’un autre ouvrage, qu’elle intitulera Le Livre des Mérites de la Vie. Ce nouvel ouvrage ne traite que d’une seule vision, qui sera largement commentée par Hildegarde. Notons qu’elle précise sans ambiguïté que les conseils qu’elle y dispense à tour de page proviennent de la lumière vivante qu’elle a vue et non d’elle-même.

Contrairement au Scivias, le livre des Mérites n’est pas illustré. Il décrit surtout la pratique à adopter dans les diverses situations qui peuvent se présenter au fur et à mesure de la vie spirituelle. Ce sont des aides pour faire ce chemin dans le mieux qui soit. Une sorte de manuel pratique, en quelque sorte, où elle va lister les vices des humains et les vertus, c’est-à-dire les remèdes. C’est à cette époque qu’elle va commencer aussi par écrire sur les plantes et les remèdes qu’on peut concocter.

Par la suite, dans son nouveau monastère, Hildegarde recevait de plus en plus de pèlerins. Le monastère est devenu une sorte de lieu de pèlerinage pour ceux et celle qui veulent retrouver la paix de l’âme et aussi la santé.

Les pratiques d'Hildegarde de Bingen

Les miracles

Hildegarde accomplit désormais des miracles comme la guérison d’une servante laïque du monastère d’une tumeur au cou ou encore, elle redonna la vue à un nourrisson né aveugle.

Des miracles post mortem ont également été attribués à Sainte Hildegarde de Bingen. Deux hommes très malades se sont rendus près du corps de l’abbesse pour la toucher après l’approbation des sœurs. Ils ressortiront guérit immédiatement. De nouveau à l’étroit dans ce monastère, elle fit construire celui-ci en 1165 à deux pas de Bingen. Son tombeau se trouve encore là-bas intact et produit encore des miracles à ce jour.

L'exorcisme

Hildegarde a bien des talents et va même se lancer dans l’exorcisme. On ne sait pas trop comment elle a procédé, car il n’y a aucun écrit dessus. Mais elle aurait eu de nombreuses visions qui l’auraient guidée dans son travail d’exorcisme.

Ses œuvres

Dès 1160, elle s’attelle à la rédaction de deux livres qui seront essentiels. Ce sont d’ailleurs, au XIIᵉ siècle, les deux seuls livres de médecine qui existent avec des principes de soins et de santé. 800 ans après, les principes édités par Hildegarde sont encore d’actualité. C’est pour cela qu’elle est revenue à la mode, il y a peu et que l’on boit ses tisanes.

Hildegarde de Bingen ne faisait pas de recettes de cuisine à la base. Il y a bien des choses qu’elle a écrites et dites qui sont reprises aujourd’hui. Le premier livre s’appelle Le livre des subtilités des créatures divines. En fait, cet ouvrage, c’est un mélange de théologie et de médecine. Elle y décrit la création divine, l’organisation de l’univers, la nature de l’homme et elle énonce que l’homme est le miroir du monde et que l’organisation de son corps reflète la création en son entier.

Dans le livre des œuvres divines, la future Sainte révèle les secrets de la nature et les pouvoirs insoupçonnés de tout ce qui y vit. On pourrait presque y voir une sorte d’encyclopédie où sont recensées et décrites 500 espèces de plantes, d’animaux, d’arbres, de poissons, de reptiles, il y a de tout. Hildegarde n’oublie pas non plus, de signaler l’importance de la place du chien et du chat comme étant les meilleurs compagnons de l’homme. Sont également évoquées les propriétés spécifiques de certaines pierres et métaux. Donc, Hildegarde disserte sur la nature et les propriétés de chaque spécimen. Elle apprend à ses lecteurs à en discerner les vertus.

En tout cas, elle explique les bienfaits pour la santé de chaque espèce, végétale ou animale. Il va y avoir un deuxième livre de médecine, celui que l’on appelle le livre de la médecine composée ou Causae et Curae, signifiant la cause et le remède. Hildegarde entreprend la rédaction de ce livre en 1163. Elle écrira pendant 11 ans puisqu’elle l’achèvera en 1174, ainsi second traité de médecine. Hildegarde évoque à travers elle, une sorte d’unité cosmique qui influence l’homme et son environnement naturel. Il existe selon elle une sorte d’énergie divine qui fait se développer l’homme, mais qui fait aussi pousser les plantes. Elle écrit que l’âme, tant qu’elle est dans le corps, ne peut voir Dieu. Lorsqu’elle aura quitté l’atelier de son corps et lorsqu’elle sera confrontée à Dieu, elle connaîtra la nature et ses anciennes dépendances corporelles.

Dans la sixième vision du livre des œuvres divines, elle va évoquer la cité de Dieu et la cité des anges. À propos des anges, elle dit que Dieu leur a confié des fonctions diverses et les a laissés au service de ses créatures. Elle dit que si l’ange est constant, l’homme, au contraire, est instable en permanence. Ce livre peut être considéré comme le sommet de son œuvre. Ce qui est intéressant de constater, c’est que dans cet ouvrage, elle ne sépare jamais les états d’âme des malades, des malaises et des maladies physiques. Pour elle, tout est relié. Le psychisme influence plus sur le physique.

La religieuse décrit précisément dans cet ouvrage les causes, les maux, les remèdes et évoque le tempérament des plantes autant que celui de l’humain. Elle expose également le principe des quatre humeurs. Ce sont des prédispositions, des tendances, des réactions morbides qui se déroulent aussi bien sur le plan spirituel que sur le plan physique. Hildegarde s’intéresse en particulier à la mélancolie, qui est en fait ce qu’on appelle la dépression aujourd’hui. Elle conçoit que parmi ces maladies qui affectent l’humain, elle est la conséquence du péché originel.

La lithothérapie

L’émeraude est un remède efficace contre toutes les infirmités et maladies humaines, car elle est née du soleil et que sa matière jaillit de la fraîcheur de l’air. Celui qui a des douleurs au cœur, à l’estomac, à un point de côté, doit porter une émeraude pour réchauffer son corps et il s’en portera mieux.

Mais si les souffrances empirent tellement qu’il ne puisse plus s’en défendre, alors il faut prendre immédiatement l’émeraude dans sa bouche, l’humidifier avec sa salive. La salive réchauffée par cette pierre doit être alternativement avalée et recrachée. Et ce faisant, la personne doit contracter et dilater son corps. Les accès subis de la maladie vont alors certainement faiblir. Voilà ce qu’on fait avec une émeraude. Ainsi, Hildegarde reconnaît aux pierres non seulement des vertus puratrices et purificatrices, mais aussi des vertus prédictives et protectrices, probablement inspirées d’ailleurs des pratiques basées sur le symbolisme magique de l’antiquité. Elle a quand même des connaissances sur Socrate, sur des tas de trucs et elle dit que si on veut bien comprendre sa démarche, pour conserver une bonne santé, il faut de l’harmonie en tout. Sans harmonie, on n’est pas en forme.

Une femme pleine de talents

L’abbesse passe plus de 40 ans à écrire et avec des visions à la clé. Hildegarde dit qu’elle venait à elle et qu’elle les recevait en pleine conscience et dans un parfait éveil de son corps. Et elle précise au sujet d’une certaine vision, « Ma vision, ce sont les yeux intérieurs de mon esprit et les oreilles intérieures qui me l’ont transmise. » Parfois, elle entendait, puisqu’elle est clairaudiente, « Écris ce que je te dis. » À propos des visions qui lui ont permis d’écrire le livre des œuvres divines, elle a écrit à un moment « Je contemplais alors dans le secret de Dieu, au cœur des espaces aériens du Midi, une merveilleuse figure. Elle avait apparence humaine. La beauté, la clarté de son visage étaient telles que regarder le soleil eût été plus facile que de regarder ses visages ». Hildegarde est aussi une illustratrice hors pair et illustre une partie de ses écrits, d’ailleurs, mieux qu’elle peut reproduire ses visions. Elle est également musicienne et compose des œuvres musicales d’une grande beauté.

On a dénombré à son actif pas moins de 70 chants liturgiques qui composent la symphonie de l’harmonie des révélations célestes. On peut écouter quelques œuvres d’Hildegarde de Bingen sur YouTube.  On lui doit aussi un drame liturgique musical composé de 82 mélodies. La légende des vertus qui s’appelle Ordo virtutum. Et ça illustre, ces chants, le tiraillement de l’âme entre les tentations du démon et les vertus.

Elle a inventé une langue, la lingua ignota. Ce sont 23 caractères qui la composent, mais pas de lettres normales, ce sont des caractères comme des symboles. On ignore si d’autres personnes l’ont utilisée. C’est comme une sorte de langage secret qui intégrerait un nouveau vocabulaire par rapport à une grammaire déjà existante.  Par exemple, « Dieu » se traduit par « ergonz ».

Hildegarde de Bingen est dotée de multiples dons, en plus d’une médium guérisseuse. On peut, sans se tromper, reconnaître qu’elle est une grande naturaliste, grâce à ses connaissances des espèces végétales et animales. C’est une écologiste avant l’heure et une femme très en avance, comme l’étaient certaines femmes au Moyen Âge.

Et puis, on ne peut pas oublier qu’Hildegarde de Bingen qui est également une prédicatrice. Elle s’éteindra le 17 septembre 1179 à l’âge de 81 ans.

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